Une réflexion à propos d' une remarque de G.qui me signale de ne pas pouvoir lire le texte sous le motif peint. En ce qui me concerne, cela n' a guère d' importance, l' essentiel restant ce qui apparait, ce qui est laissé volontairement ou involontairement à la lecture. Laisser le champ à des lectures aléatoires selon le lecteur, cela me va. Et puis le commentaire de O., qui m' irrite tellement je le trouve extérieur à ce à quoi il est destiné... Et je me dis qu' il s' agit d' une lecture aléatoire en somme...et je reprends l' exemplaire acheté en double de mon livre peint, aux pages précises concernant les deux remarques citées ci-dessus. Oublié, le texte depuis le temps de ma première lecture ?
Eh bien, les pages 39 et 40, par le plus incroyable des hasards ( ? )égrènent le récit d' un envahissement par le dessin, la peinture, une totale maculation !
" Klaus Friedrich, menuisier de son état, sur le quai, et peintre par-dessus l'entrepôt de son père, dans l'île, il se comparait à l'écrivain allemand Hôlderlin, poète au premier étage de la menuiserie Zimmer au rez-de-chaussée. Et lui il était le menuisier en bas et le poète en haut, et moi, tout en bas, j'étais émerveillé, et le mot génie à partir de ce moment je pouvais lui donner un nom propre, celui de mon ami Klaus Friedrich. La Marne en contrebas devenait la rivière Neckar, et chaque soir ou presque je jouais le rôle de l'étudiant Wilhelm Waiblinger, en ce 3 juillet 1822, venu de Stuttgart à Tiibingen, visiter le poète au-dessus du menuisier, le peintre et le menuisier, et le peintre par-dessus le monde infect du marais des innombrables serpents. Klaus Friedrich travaillait dans la voie lactée parfois, par-dessus le marais souvent, contre la porte et les portes aussi, d'abord par brassage et déplacement. Dans l'allée, créant des sentiers entre les piles, enjambant des coffrets et posant un tuteur contre un entassement de dossiers, il fourrageait, triait, distribuait, s'arrêtant sur un tract, déchiffrant une lettre, il avançait dans le fourré, écartant chaque feuille jusqu'au rameau sur lequel il allait s'installer. Ainsi travaillait-il, à la recherche constante du moindre document et sur tous les documents, vidant les caisses, retournant les piles, fourrageant dans les cartons, ouvrant chaque livre, considérant n'importe quelle effigie, des nuits entières, et par-dessus, Klaus insistait beaucoup sur le fait que son art soit bien situé par-dessus chaque feuille, couvercle, photographie, lettre, caisse, reliure, page d'un livre, d'un album ou de revue, il dessinait et peignait. Ce qu'il représentait, au crayon, ou à l'aquarelle le plus souvent, n'était rien d'autre que le sujet, le sujet le plus frappant, le plus important pour lui de la page ou du contenu de la boîte qu'il ornait. Ainsi au fur et à mesure des semaines, des mois et des années, l'héritage de Klaus Friedrich le père, tout constitué d'imprimés et de manuscrits où abondaient certains grands noms de l'histoire, était-il recouvert par Klaus Friedrich son fils, chaque soir ou presque, de magnifiques peintures dont le sujet n'était autre que le sujet de ce qui était recouvert. Jusqu'alors Klaus ne s'était pas encore attaqué à la bibliothèque dont il prévoyait d'extraire et d' orner chaque page, au recto et au verso, mais déjà une bonne partie de la correspondance accumulée durant une vie et un lot important de manuscrits avaient reçu leur ornement. J'admirais en particulier beaucoup les soixante-quatre lettres de Thomas Mann sur lesquelles il me semblait que Klaus s'était bien appliqué, devenues chacune une sorte de rébus, par l'agglutination que l'on y pouvait considérer de multiples objets et paysages et visages qui recouvraient le feuillet, tout ça laissant parfois apparaître un mot épargné entre les passages du pinceau ; par exemple, âme, mort, idée, infini, rêve, politique, ou d'autres mots encore qui dans l'esprit de Klaus Friedrich ne se prêtaient pas au travail du peintre." ( Bernard Lamarche Vadel )
ça ne me dérange pas de ne rien pouvoir lire!! j'ai essayé! mais comme je suis paresseuse....et le motif se suffit en lui-même , l'écrit derrière sert de décor..non? IL Y A un dragon par là!
On se fiche de pouvoir lire le texte: il porte la peinture, comme une mère porte son enfant. Il existe autour, détourage d'une danse "posée-serrée", matrice d'un je. Il fait sens dans ce qu'il est, dans son état actuel, dans ce qu'il donne de perceptible, voire de lisible, en priorité un sens plastique bien sûr, mais aussi par l'élimination, par le recouvrement, un sens remanié, revisité, choisi, préféré, le sens de l'élu, celui qu'on donne à ce qu'on garde, le sens d'une valorisation, d'un anoblissement.
@Gwendoline, Je sens bien chez vous la fibre du peintre, et il y a en quelque sorte un effet palimpseste dans ces peintures, vous l' avez très bien ressenti et compris. Par contre, le fond est plus qu' un "décor ", je dirai un support, plus que nécessaire. Avec le temps, je me suis rendu compte que principalement, un support me convenait à condition d' être déjà peint ou écrit ! Merci de votre attention !
Que puis-je ajouter à votre si juste et si fort texte Arthémisia ? Que je me sens infiniment proche de vos mots, de votre ressenti de la peinture...Que l' intelligence des yeux passe par le corps et nous retourne au monde comme une crêpe. Non pas du crêpe de deuil, mais bien plutôt de la nourriture de fête qui nous maintient en vie. Votre passage, une vraie petite bombe d' énergie ! Excellente fin de soirée.
Bonjour, je voudrais vous remercier pour ces mots magiques !!!
"Que je me sens infiniment proche de vos mots, de votre ressenti de la peinture...Que l' intelligence des yeux passe par le corps et nous retourne au monde comme une crêpe. Non pas du crêpe de deuil, mais bien plutôt de la nourriture de fête qui nous maintient en vie."
Non, megi, c' est moi qui vous dit merci de faire l' effort de venir me voir ! Que vous y trouviez quelque satisfaction, cela me fait sincèrement plaisir. Pourquoi tenir un blog ouvert, sinon pour le plaisir de l' échange ? ( La vie nous occupe tellement... ) Superbe fin de soirée!
Mais mais mais! Qui est JM Staive, je soupçonne que ce soit le même que Versus Anima? Oh la la j'y comprend rien… C'est dur ce matin… Il faut dire que je ne suis pas très malin c'est vrai! J'y comprends rien Qu'importe Belle peinture…
Une réflexion à propos d' une remarque de G.qui me signale de ne pas pouvoir lire le texte sous le motif peint.
RépondreSupprimerEn ce qui me concerne, cela n' a guère d' importance, l' essentiel restant ce qui apparait, ce qui est laissé volontairement ou involontairement à la lecture.
Laisser le champ à des lectures aléatoires selon le lecteur, cela me va.
Et puis le commentaire de O., qui m' irrite tellement je le trouve extérieur à ce à quoi il est destiné...
Et je me dis qu' il s' agit d' une lecture aléatoire en somme...et je reprends l' exemplaire acheté en double de mon livre peint, aux pages précises concernant les deux remarques citées ci-dessus.
Oublié, le texte depuis le temps de ma première lecture ?
Eh bien, les pages 39 et 40, par le plus incroyable des hasards ( ? )égrènent le récit d' un envahissement par le dessin, la peinture, une totale maculation !
RépondreSupprimer" Klaus Friedrich, menuisier de son état, sur le quai, et peintre par-dessus l'entrepôt de son père, dans l'île, il se comparait à l'écrivain allemand Hôlderlin, poète au premier étage de la menuiserie Zimmer au rez-de-chaussée. Et lui il était le menuisier en bas et le poète en haut, et moi, tout en bas, j'étais émerveillé, et le mot génie à partir de ce moment je pouvais lui donner un nom propre, celui de mon ami Klaus Friedrich.
La Marne en contrebas devenait la rivière Neckar, et chaque soir ou presque je jouais le rôle de l'étudiant Wilhelm Waiblinger, en ce 3 juillet 1822, venu de Stuttgart à Tiibingen, visiter le poète au-dessus du menuisier, le peintre et le menuisier, et le peintre par-dessus le monde infect du marais des innombrables serpents.
Klaus Friedrich travaillait dans la voie lactée parfois, par-dessus le marais souvent, contre la porte et les portes aussi, d'abord par brassage et déplacement. Dans l'allée, créant des sentiers entre les piles, enjambant des coffrets et posant un tuteur contre un entassement de dossiers, il fourrageait, triait, distribuait, s'arrêtant sur un tract, déchiffrant une lettre, il avançait dans le fourré, écartant chaque feuille jusqu'au rameau sur lequel il allait s'installer. Ainsi travaillait-il, à la recherche constante du moindre document et sur tous les documents, vidant les caisses, retournant les piles, fourrageant dans les cartons, ouvrant chaque livre, considérant n'importe quelle effigie, des nuits entières, et par-dessus, Klaus insistait beaucoup sur le fait que son art soit bien situé par-dessus chaque feuille, couvercle, photographie, lettre, caisse, reliure, page d'un livre, d'un album ou de revue, il dessinait et peignait. Ce qu'il représentait, au crayon, ou à l'aquarelle le plus souvent, n'était rien d'autre que le sujet, le sujet le plus frappant, le plus important pour lui de la page ou du contenu de la boîte qu'il ornait. Ainsi au fur et à mesure des semaines, des mois et des années, l'héritage de Klaus Friedrich le père, tout constitué d'imprimés et de manuscrits où abondaient certains grands noms de l'histoire, était-il recouvert par Klaus Friedrich son fils, chaque soir ou presque, de magnifiques peintures dont le sujet n'était autre que le sujet de ce qui était recouvert. Jusqu'alors Klaus ne s'était pas encore attaqué à la bibliothèque dont il prévoyait d'extraire et d' orner chaque page, au recto et au verso, mais déjà une bonne partie de la correspondance accumulée durant une vie et un lot important de manuscrits avaient reçu leur ornement. J'admirais en particulier beaucoup les soixante-quatre lettres de Thomas Mann sur lesquelles il me semblait que Klaus s'était bien appliqué, devenues chacune une sorte de rébus, par l'agglutination que l'on y pouvait considérer de multiples objets et paysages et visages qui recouvraient le feuillet, tout ça laissant parfois apparaître un mot épargné entre les passages du pinceau ; par exemple, âme, mort, idée, infini, rêve, politique, ou d'autres mots encore qui dans l'esprit de Klaus Friedrich ne se prêtaient pas au travail du peintre." ( Bernard Lamarche Vadel )
ça ne me dérange pas de ne rien pouvoir lire!! j'ai essayé! mais comme je suis paresseuse....et le motif se suffit en lui-même , l'écrit derrière sert de décor..non? IL Y A un dragon par là!
RépondreSupprimerOn se fiche de pouvoir lire le texte: il porte la peinture, comme une mère porte son enfant. Il existe autour, détourage d'une danse "posée-serrée", matrice d'un je.
RépondreSupprimerIl fait sens dans ce qu'il est, dans son état actuel, dans ce qu'il donne de perceptible, voire de lisible, en priorité un sens plastique bien sûr, mais aussi par l'élimination, par le recouvrement, un sens remanié, revisité, choisi, préféré, le sens de l'élu, celui qu'on donne à ce qu'on garde, le sens d'une valorisation, d'un anoblissement.
@Gwendoline,
RépondreSupprimerJe sens bien chez vous la fibre du peintre, et il y a en quelque sorte un effet palimpseste dans ces peintures, vous l' avez très bien ressenti et compris.
Par contre, le fond est plus qu' un "décor ", je dirai un support, plus que nécessaire.
Avec le temps, je me suis rendu compte que principalement, un support me convenait à condition d' être déjà peint ou écrit !
Merci de votre attention !
Que puis-je ajouter à votre si juste et si fort texte Arthémisia ?
RépondreSupprimerQue je me sens infiniment proche de vos mots, de votre ressenti de la peinture...Que l' intelligence des yeux passe par le corps et nous retourne au monde comme une crêpe. Non pas du crêpe de deuil, mais bien plutôt de la nourriture de fête qui nous maintient en vie.
Votre passage, une vraie petite bombe d' énergie !
Excellente fin de soirée.
Bonjour,
RépondreSupprimerje voudrais vous remercier pour ces mots magiques !!!
"Que je me sens infiniment proche de vos mots, de votre ressenti de la peinture...Que l' intelligence des yeux passe par le corps et nous retourne au monde comme une crêpe. Non pas du crêpe de deuil, mais bien plutôt de la nourriture de fête qui nous maintient en vie."
salutations
Megi
Un verre de cidre alors, Staive, brut bien sûr?!
RépondreSupprimerNon, megi, c' est moi qui vous dit merci de faire l' effort de venir me voir !
RépondreSupprimerQue vous y trouviez quelque satisfaction, cela me fait sincèrement plaisir.
Pourquoi tenir un blog ouvert, sinon pour le plaisir de l' échange ?
( La vie nous occupe tellement... )
Superbe fin de soirée!
Arthémisia, quel sens de l' harmonie des saveurs !
RépondreSupprimerMais mais mais!
RépondreSupprimerQui est JM Staive,
je soupçonne que ce soit le même que Versus Anima?
Oh la la j'y comprend rien… C'est dur ce matin…
Il faut dire que je ne suis pas très malin c'est vrai!
J'y comprends rien
Qu'importe
Belle peinture…
Vous avez raison TG, Staive et Versus, même combat mais avec des moyens différents!
RépondreSupprimerComme vous avez dû le constater...